, La nature
Problématiques :
- Quel est le point commun entre les différents sens que recouvre ce
terme ? Quelle est l’essence de la nature ?
- Est-il pertinent de distinguer la nature de son inverse : la culture ou
l’artifice ?
- Le concept désigne-t-il une réalité objective, ou est-il avant tout
normatif ?
Les stoïciens et l’idée de tendances naturelles et non-naturelles
Les stoïciens ont particulièrement insisté sur cette idée : s’interrogeant
sur la meilleure manière de vivre, distinguant les tendances naturelles
des hommes, par oppositions à des tendances non naturelles. Ainsi, par
exemple, manger pour se nourrir est naturel, alors que manger par
gourmandise ne l’est pas. Pour vivre une vie bonne et philosophique, les
hommes devraient suivre leurs besoins naturels et se tenir à distance de
ce qui s’en écarte.
Nature et domination selon Socrate
Dans le Gorgias de Platon, Socrate rappelle la conception harmonieuse
de la nature. Plus loin, Socrate discute avec Calliclès qui, partant d’une
même définition de la nature, en tire des règles d’existence différentes.
Pour Calliclès, suivre la nature ne signifie pas mener une vie simple,
comme le pensent les stoïciens, ni s’efforcer de se rendre maître de ses
désirs, comme le pense Socrate. Il élargit la définition en développant le
concept de justice naturelle :
« […] la justice consiste en ce que le meilleur ait plus que le moins bon,
et le plus fort que le moins fort. » Selon Calliclès, la nature n’est pas
seulement un principe d’harmonie et d’unité, elle est aussi une
justification de la domination et de la force.
La distinction du « naturel » et de l’« artificiel » selon Aristote.
Aristote propose de distinguer les choses qui existent par la nature, de
celles qui existent par d’autres causes, auxquelles il donne le nom
d’« art ». Pourtant, Aristote ne fait pas de la nature le domaine de la pure
liberté, mais un univers régi par des lois au même titre que la société. Si
la nature peut nous apparaître comme sauvage et dépourvue de
rationalité humaine, elle est pourtant un monde avant tout physique,
c’est-à-dire régi par les lois de la physique. On peut comprendre la
nature comme un tout, mais un tout régi par un ensemble cohérent de
lois.
, Descartes et l’idée de se rendre maître de la nature.
Il s’agit, pour l’humanité moderne, de s’affranchir de la domination de la
nature, ainsi que l’exprime Descartes dans son Discours de la méthode.
Grâce aux connaissances techniques et scientifiques, les hommes
pourraient se rendre « comme maîtres et possesseurs de la nature ».
Il faut toutefois nuancer ce désir de maîtrise, Descartes disant bien qu’il
s’agit de se rendre « comme » maître. Son objectif n’est pas la
domination de la nature pour elle-même, mais l’amélioration des
conditions de vie. Descartes renverse donc le modèle antique de
l’harmonie.
La nature comme moyen selon Kant.
En distinguant conceptuellement fin et moyen, Kant a contribué à
circonscrire le rôle de la nature dans son livre : Fondements de la
métaphysique des mœurs. Si la nature est dépourvue de raison, elle n’a
donc qu’une « valeur relative », c’est-à-dire relativement à ce qu’elle
permet de réaliser (par exemple, se nourrir). La nature est ici définie
comme moyen et non comme fin en soi, c’est-à-dire comme ce qui vaut
pour soi-même. En tant que moyen, elle est donc au service d’une fin qui
lui est extérieure.
Critique du dualisme entre « nature » et « culture », selon Philippe
Descola
L’anthropologue français Philippe Descola a critiqué le dualisme entre
nature et culture, en observant que le concept de nature, loin d’être
universel, était au contraire propre à la pensée occidentale. Il explique
que « sans doute la nature n’existe-t-elle pas pour bien des peuples
comme un domaine ontologique [c’est-à-dire formant la même unité
qu’un être] autonome » et que la question de la nature ne s’est « guère
posée pour de nombreuses cultures. C’est là un fétiche qui nous est
propre » (Par-delà nature et culture, 2005). L’ensemble de ce qui existe
n’est pas compris à travers la dualité entre le naturel et le non naturel.
À retenir :
L’idée de nature repose avant tout sur des postulats métaphysiques, par
exemple sur une conception mécaniste ou finaliste du monde. La nature
est avant tout un concept axiologique, c’est-à-dire chargé de valeurs. Il
importe donc de mettre à jour ces valeurs, soit pour s’en méfier, soit, au
contraire, pour défendre les valeurs qu’une pensée uniquement utilitaire
contribue à détruire.
Problématiques :
- Quel est le point commun entre les différents sens que recouvre ce
terme ? Quelle est l’essence de la nature ?
- Est-il pertinent de distinguer la nature de son inverse : la culture ou
l’artifice ?
- Le concept désigne-t-il une réalité objective, ou est-il avant tout
normatif ?
Les stoïciens et l’idée de tendances naturelles et non-naturelles
Les stoïciens ont particulièrement insisté sur cette idée : s’interrogeant
sur la meilleure manière de vivre, distinguant les tendances naturelles
des hommes, par oppositions à des tendances non naturelles. Ainsi, par
exemple, manger pour se nourrir est naturel, alors que manger par
gourmandise ne l’est pas. Pour vivre une vie bonne et philosophique, les
hommes devraient suivre leurs besoins naturels et se tenir à distance de
ce qui s’en écarte.
Nature et domination selon Socrate
Dans le Gorgias de Platon, Socrate rappelle la conception harmonieuse
de la nature. Plus loin, Socrate discute avec Calliclès qui, partant d’une
même définition de la nature, en tire des règles d’existence différentes.
Pour Calliclès, suivre la nature ne signifie pas mener une vie simple,
comme le pensent les stoïciens, ni s’efforcer de se rendre maître de ses
désirs, comme le pense Socrate. Il élargit la définition en développant le
concept de justice naturelle :
« […] la justice consiste en ce que le meilleur ait plus que le moins bon,
et le plus fort que le moins fort. » Selon Calliclès, la nature n’est pas
seulement un principe d’harmonie et d’unité, elle est aussi une
justification de la domination et de la force.
La distinction du « naturel » et de l’« artificiel » selon Aristote.
Aristote propose de distinguer les choses qui existent par la nature, de
celles qui existent par d’autres causes, auxquelles il donne le nom
d’« art ». Pourtant, Aristote ne fait pas de la nature le domaine de la pure
liberté, mais un univers régi par des lois au même titre que la société. Si
la nature peut nous apparaître comme sauvage et dépourvue de
rationalité humaine, elle est pourtant un monde avant tout physique,
c’est-à-dire régi par les lois de la physique. On peut comprendre la
nature comme un tout, mais un tout régi par un ensemble cohérent de
lois.
, Descartes et l’idée de se rendre maître de la nature.
Il s’agit, pour l’humanité moderne, de s’affranchir de la domination de la
nature, ainsi que l’exprime Descartes dans son Discours de la méthode.
Grâce aux connaissances techniques et scientifiques, les hommes
pourraient se rendre « comme maîtres et possesseurs de la nature ».
Il faut toutefois nuancer ce désir de maîtrise, Descartes disant bien qu’il
s’agit de se rendre « comme » maître. Son objectif n’est pas la
domination de la nature pour elle-même, mais l’amélioration des
conditions de vie. Descartes renverse donc le modèle antique de
l’harmonie.
La nature comme moyen selon Kant.
En distinguant conceptuellement fin et moyen, Kant a contribué à
circonscrire le rôle de la nature dans son livre : Fondements de la
métaphysique des mœurs. Si la nature est dépourvue de raison, elle n’a
donc qu’une « valeur relative », c’est-à-dire relativement à ce qu’elle
permet de réaliser (par exemple, se nourrir). La nature est ici définie
comme moyen et non comme fin en soi, c’est-à-dire comme ce qui vaut
pour soi-même. En tant que moyen, elle est donc au service d’une fin qui
lui est extérieure.
Critique du dualisme entre « nature » et « culture », selon Philippe
Descola
L’anthropologue français Philippe Descola a critiqué le dualisme entre
nature et culture, en observant que le concept de nature, loin d’être
universel, était au contraire propre à la pensée occidentale. Il explique
que « sans doute la nature n’existe-t-elle pas pour bien des peuples
comme un domaine ontologique [c’est-à-dire formant la même unité
qu’un être] autonome » et que la question de la nature ne s’est « guère
posée pour de nombreuses cultures. C’est là un fétiche qui nous est
propre » (Par-delà nature et culture, 2005). L’ensemble de ce qui existe
n’est pas compris à travers la dualité entre le naturel et le non naturel.
À retenir :
L’idée de nature repose avant tout sur des postulats métaphysiques, par
exemple sur une conception mécaniste ou finaliste du monde. La nature
est avant tout un concept axiologique, c’est-à-dire chargé de valeurs. Il
importe donc de mettre à jour ces valeurs, soit pour s’en méfier, soit, au
contraire, pour défendre les valeurs qu’une pensée uniquement utilitaire
contribue à détruire.