voulez-vous, je m’entête affreusement à adorer la liberté libre […] ». En quoi cette
citation éclaire-t-elle votre lecture de l’œuvre ?
Vous répondrez à cette question dans un développement organisé.
Votre réflexion prendra appui sur les Cahiers de Douai, sur les textes et documents
étudiés dans le cadre du parcours « Émancipations créatrices », ainsi que sur votre
culture personnelle.
Plan utilisé :
I- Une liberté physique : une émancipation géographique
A- Des références aux fugues à Charleroi.
B- Une envie omniprésente de s’enfuir…
II- Une liberté intellectuelle : une diversité des thèmes abordés
A- La bourgeoisie victime d’une satire féroce.
B- La mise en accusation du pouvoir politique.
C- Un anticléricalisme perceptible.
III- Une liberté esthétique : une émancipation poétique.
A- Le renouvellement des formes.
B- Une liberté de ton : un lyrisme sensuel et provocateur.
C- Une autre conception de la poésie.
, Le XIXème siècle est celui des Révolutions. Lors de ce siècle, le mouvement littéraire du
symbolisme voit naître des auteurs comme Arthur Rimbaud, figure inclassable de la littérature
française. Jeune homme flamboyant, il mène une vie de bohème, accompagné de Paul Verlaine,
un autre poète de l’époque. Poète, voyageur, bohémien, le jeune homme vivra mille vies avant
d’aller se perdre en Afrique. C’est à l’âge de seize ans qu’il rédige les vingt-deux poèmes qui
formeront Les Cahiers de Douai et qui ne seront publiés qu’en 1919. Après avoir envoyé ses
poèmes à Paul Demeny, celui-ci écrira à son professeur, George Izambard, qu’il s’évertue à
« adorer la liberté libre ». Nous pouvons alors nous demander dans quelle mesure les Cahiers de
Douai dévoilent-ils les émancipations créatrices du jeune poète. À cet effet, nous verrons que ce
recueil illustre la liberté physique, intellectuelle et esthétique d’Arthur Rimbaud.
Dans un premier temps, les Cahiers de Douai apportent une clairvoyance sur la liberté
physique et ainsi sur l’émancipation géographique de Rimbaud…
Tout d’abord, il semble important de prendre en compte les différentes fugues réalisées
par Rimbaud durant sa jeunesse : le première durant l’été 1870 (fin août pour ainsi dire), où il
comptait rejoindre Paris par le train ; et la seconde, s’étant déroulée au cours du mois d’octobre,
où celui-ci comptait rejoindre Charleroi, en Belgique, afin de chercher du travail (dans l’espoir
d’être embauché dans un des journaux de Charleroi). C’est bien cette dernière, qui sera
perceptible à de nombreuses reprises dans le recueil. À titre d’exemple, on pourrait prendre « Au
Cabaret Vert », où nous découvrons un moment de répit pour le poète, lorsqu’il « entrai[t] à
Charleroi » (vers 2) ; et qu’une jeune femme va lui servir « Du jambon rose et blanc parfumé /
D’une gousse d’ail » (vers 12-13). Il en va de même pour « La Maline », reprenant la même idée
que le poème précédent, où Rimbaud va se retrouver dans « une salle à manger brune »,
dégustant un « Met / Belge ». Mais le jeune prodige ne va pas uniquement décrire des lieux
reposant durant sa fugue : il en profita pour rédiger « L’Éclatante victoire de Sarrebrück » ; une
satire de Napoléon III, portant sur une gravure se vendant à Charleroi, dont nous reparlerons
après…
Puis, en plus de donner au lecteur des références à ses escapades, celui-ci gardera dans
ses poèmes une place importante à la fuite, toujours dans l’objectif de trouver « Moi, pressé de
trouver le lieu et la formule » (Le Vagabond, Les Illuminations). Nous pouvons nous appuyer sur
« Sensation », où le poète déclare : « J’irai loin, bien loin, comme un bohémien/ Par la Nature-
heureux comme avec une femme » (vers 7 et 8). Idée reprise dans « Les Réparties de Nina », : « Lui
- Ta poitrine sur ma poitrine, / Hein ? nous irions, / Ayant de l'air plein la narine, / Aux frais rayons
/ Du bon matin bleu, qui vous baigne / Du vin de jour ?... » (vers 1 à 6) ; où Arthur Rimbaud semble
vouloir s’échapper de toute tutelle et être en contact avec la Nature très loin (personnifiée dans
« Sensation ») ou bien s’enfuir avec une femme dans « Les Réparties de Nina »). Enfin, le poète ira
jusqu’à dédier un poème entier à la fugue : « Ma Bohème ». Dans celui-ci, il semble vouloir
s’échapper de ce monde angoissant : « Petit poucet rêveur, j’égrenais dans ma course / Des
rimes. Mon auberge était à la grande ourse » (vers 6-7). Le voyage tient aussi une place
prépondérante dans l’œuvre du poète Charles Baudelaire, comme on peut le voir dans des
poèmes comme « Le Voyage » ou « L’Invitation au voyage ».
Toutefois, la « liberté libre » de Rimbaud ne semble pas s’arrêter à une émancipation
géographique, mais se ressent aussi dans la variété des thèmes abordés, le poète se libérant
intellectuellement.