Dans son dernier texte rédigé avant sa mort intitulé Traité Politique Spinoza, philosophe du
17ème siècle, a voulu réunir l'ensemble des moyens qui selon lui permettraient d'instituer la paix
entre les hommes. Cet ouvrage pensé de façon indépendante permettrait au lecteur de s'intéresser à
la philosophie politique de l'auteur sans avoir recours à d'autres de ses écrits (comme celui de
l’Éthique rédigé au même moment). Le Traité Politique est divisé en 200 articles répartis en 11
chapitres, il montre que la seule façon d'instituer cette paix est de se détacher des passions pour se
tourner vers la raison, pour cela il faut préconiser les relations sociales et donc former un corps
politique uni, une communauté. Mais comment instaurer cette paix alors que chaque homme veut
établir sa domination par rapport aux autres, parfois de façon violente ? Grâce à l'état civil nous
pouvons instituer des lois qui régiront le bon fonctionnement de la société. Mais comment l'homme
évolue-t-il dans un État ? S'adapte-t-il totalement à la vie en communauté en rompant avec son état
de nature ? Ce sont quelques unes des questions que le Traité Politique met en lumière.
Dans ces articles 5 et 6 du chapitre III du Traité Politique Spinoza émet la théorie selon
laquelle chaque citoyen vivant dans une cité doit suivre absolument les prescriptions de cette cité
sans les remettre en question. Il se demande alors comment pouvoir associer cela au fait que
l'homme exprime avant tout sa liberté par l'usage de sa raison, comment en effet un homme
raisonné peut-il se remettre entièrement au bon vouloir de la cité en terme de morale ? Nous
pouvons noter 3 moments principaux dans cet extrait du Traité, tout d'abord l'article 5 (ligne 1 à 6)
présente ce qui doit être, le citoyen doit obéir aux « injonctions » de la cité. Puis à partir de l'article
6, de la ligne 7 à 10 (de « Mais, peut-on objecter... » à « qui vivent sous la conduite de la raison »)
Spinoza présente la contradiction que cela révèle par rapport à l'exigence de raison que tout citoyen
doit avoir. Enfin, de la ligne 10 à la fin (de « Mais puisque la raison... » à « conséquemment son
droit. ») l'auteur montre que raison et obéissance à la cité ne sont pas contradictoires mais au
contraire complémentaires et que donc il n'est pas insensé d'assurer cette obéissance à l’État.
Nous remarquons tout d'abord que l'article 5 du chapitre III débute par la conjonction
« donc », il est de ce fait le résultat d'une réflexion précédente. En effet, Spinoza montre aux articles
précédents (3 et 4 notamment) que l'homme ne doit pas « vivre selon sa propre complexion » car
cela reviendrait à retourner à l'état de nature que l'organisation en un État tend à effacer. L'état de
nature est caractérisé par le règne des passions et non pas par celui de la raison qui n'a pour but que
notre conservation et donc qui nous est bénéfique. C'est en montrant cela qu'il en vient à l'article 5 à
dire que «[...] chaque citoyen relève non de lui-même, mais de la Cité [...] ». Nous devons donc
« obéir » aux « injonctions » de la Cité qui se situent au niveau de la morale et de la justice. Nous ne
décidons pas personnellement de ce qui est moral ou juste, c'est le rôle de la Cité de nous dire ce
que nous devons considérer comme tel. Ici Spinoza n'accorde pas un rôle prépondérant aux
théologiens et aux philosophes, c'est l’État qui guide nos actions, elles sont jugées justes ou injustes
en fonction de ce que l’État a prévu dans ses lois. Cela est justifié par le fait que l’État doit être
dirigé par « une seule pensée » qui exprime « la volonté de la Cité » et puisque ce sont les hommes
qui ont confié le pouvoir à cette Cité, alors elle exprime également « la volonté de tous ». Cela est
déjà évoqué aux articles précédents celui- ci, il est dit à l'article 3 du chapitre III « Si enfin elle
1